Épinglage - 27/09/2025 cours 2, Monique Kusnierek
- sectioncliniquedeb
- 6 nov.
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Dernière mise à jour : 21 nov.
Lors de son premier cours, Monique Kusnierek a retracé une partie du chemin qui mène vers la psychose ordinaire[1]. Ce terme a été introduit, pour la première fois, par JAM lors de la Convention d’Antibes en 1998. Plus précisément, il résulte de trois conversations successives des Sections cliniques (Angers 1996, Arcachon 1997 et Antibes 1998).
Avant d’en venir à ces trois conversations, MK rappelle que, dans sa théorie classique[2], Lacan formalise l’Œdipe à partir du schéma de la métaphore : dans la névrose, le Nom-du-père vient se substituer au désir de la mère et lui donner la signification phallique. Il indique encore que le Nom-du-Père est dans l’Autre le signifiant de l’Autre en tant que lieu de la loi – celui qui donne support à la loi. Il appréhende alors la psychose à partir de la forclusion du NDP. Peu après, il mettra l’accent, au contraire, sur l’inexistence de l’Autre de l’Autre, sur l’absence de garantie dans l’Autre. La forclusion vaut dès lors pour tous, elle est généralisée[3] et la clinique s’appréhende de manière continuiste. Il distingue alors le Nom-du-Père comme élément signifiant et la fonction NDP – barrer le désir de la mère, barrer la jouissance – et il introduit la pluralisation des noms-du-père. À noter qu’il faut se référer au dernier enseignement de Lacan pour penser la psychose ordinaire.
À Angers[4], en 1996, sur le chemin de l’invention de ce terme psychose ordinaire, JAM indiquait que névrose et psychose sont déjà susceptibles d’une perspective commune et continuiste à partir de l’articulation causale entre le signifiant et le signifié, au moment même où cette articulation se rompt. Pour chaque être parlant, le désir de la mère vaut en effet comme un x, une inconnue : dans la névrose, il prend la valeur de signification phallique ; dans la psychose, ça fait énigme.
Mais quand nous apercevons que le signifiant n’est pas transparent ni évanescent, qu’il a sa densité propre, qu’il ne meurt pas, qu’il ne s’évanouit pas dans les bras du signifié dont il accouche, alors on s’aperçoit que les signifiants ne parlent qu’aux signifiants. En général ces signifiants entre eux conspirent, ne nous veulent pas du bien. Et bien cette lueur de lucidité, nous l’avons (chez le non-psychotique) dans la surprise où nous récupérons quelque chose de l’écart entre signifiant et signifié. Dans cette perspective, la norme, ce n’est pas l’articulation du signifiant et du signifié, c’est l’énigme.
À Arcachon[5] en 1997, JAM revient sur le binaire classique névrose/psychose, pour lequel nous avons un trait distinctif pertinent : la présence ou l’absence du Nom-du Père. Dans la clinique borroméenne, nous avons plutôt une gradation qu’une opposition franche. Néanmoins, JAM cherche un trait différentiel, qui serait le point de capiton. Le point de capiton est ici à appréhender moins comme un élément (à l’instar du Nom-du-Père) que comme un système, un nouage, un appareil qui agrafe. Et il peut prendre deux valeurs : Nom-du-Père ou symptôme. C’est un point cardinal de la clinique borroméenne. Lacan fait alors du Nom-du-Père, un symptôme. On peut d’ailleurs, dans l’après coup, relire la métaphore paternelle comme étant le premier appareil du symptôme que Lacan ait démontré, c’est-à-dire le premier appareil qui localise la jouissance, qui assure l’articulation entre une opération signifiante et ses conséquences sur la jouissance d’un sujet.
À Arcachon encore, à propos des ruptures fréquentes qui jalonnent la vie d’un sujet, JAM proposait de parler de débranchement, plutôt que de déclenchement, et de réserver ce dernier terme à la psychose classique.
Enfin, à Antibes[6], JAM proposait que le volume de la Convention à paraître porte comme titre, non pas le néo-déclenchement, la néo-conversion et le néo-transfert dans les néo-psychoses, mais tout simplement La psychose ordinaire.
Il faut dire qu’au cours de l’enseignement de Lacan, le signifiant a changé de valeur, il n’est plus seulement un appareil qui, à s’articuler à un autre signifiant, produit du sens. Il est aussi un appareil de jouissance. Il y a dès lors une même difficulté pour chaque être parlant, il y a une égalité : tous égaux devant la jouissance.
Resserrage effectué par Dorothée Cols, participante à la Section clinique de Bruxelles, avec la contribution de Monique Kusnierek.
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[1] Monique Kusnierek renvoie à D. Avdelidi, « La psychose ordinaire, La forclusion du Nom-du-Père dans le dernier enseignement de Lacan », Éditions Presses Universitaires de Rennes.
[2] Monique Kusnierek se réfère au texte de Lacan « D’une question préliminaire à tout traitement possible de la psychose », dans les Écrits, Éditions du Seuil.
[3] Monique Kusnierek propose, à ce propos, le cours de JAM « Ce qui fait insigne » en référence, disponible sur internet.
[4] Le conciliabule d’ Angers, effets de surprise dans les psychoses, Le Paon, collection publiée par J.-A Miller, Agalma éditeur, diffusion Le Seuil.
[5] La conversation d’ Arcachon, cas rares : les inclassables de la clinique, Le Paon, collection publiée par J.-A Miller, Agalma éditeur, diffusion Le Seuil.
[6] La Psychose ordinaire, La convention d’ Antibes, Le Paon, collection publiée par J.-A Miller, Agalma éditeur, diffusion Le Seuil.





